Sainte Marie, Vierge de l’attente,
donne-nous de ton huile, parce que nos lampes s’éteignent.
Vois, nos réserves se sont consumées.
Ne nous envoie pas chez d’autres marchands.
Allume à nouveau dans nos âmes les anciennes ardeurs

qui nous brûlaient de l’intérieur,

quand il suffisait d’un rien pour nous faire tressaillir de joie :

l’arrivée d’un ami lointain, le rouge du soir après l’orage,

le crépitement de la bûche qui en hiver surveillait les retours à la maison,

le son des cloches carillonnant les jours de fête,

 l’arrivée des hirondelles au printemps,

 l’arrondi tendre et mystérieux du ventre maternel,
le parfum de lavande qui faisait irruption quand on préparait un berceau.

Si aujourd’hui nous ne savons plus attendre,

c’est parce que nous sommes à court d’espérance.
Ses sources se sont asséchées.
Nous souffrons d’une crise profonde du désir.
Et, désormais satisfaits des mille succédanés qui nous assaillent,

nous risquons de ne plus rien attendre,
pas même ces promesses surnaturelles

qui ont été signées avec le Sang du Dieu de l’Alliance.

Sainte Marie, femme de l’attente,

soulage la douleur des mères souffrant pour leurs fils

qui, sortis un jour de la maison, n’y sont jamais revenus,

 tués dans un accident ou séduits par les appels de la jungle;
dispersés par la fureur de la guerre ou aspirés par le tourbillon des passions;

engloutis par la fureur de l’océan ou bouleversés par les tempêtes de la vie.

Sainte Marie, Vierge de l’attente, donne-nous une âme de veilleur…
Nous nous sentons malheureusement plutôt fils du crépuscule
que prophètes de l’Avent.
Sentinelle du matin, réveille dans nos coeurs la passion

de fraîches nouvelles à porter à un monde qui se sent déjà vieux.
Apporte-nous enfin la harpe et la cithare,

afin qu’avec toi, matinale, nous puissions réveiller l’aurore.
Face aux changements qui secouent l’histoire,

donne-nous de sentir sur notre peau les frissons des commencements.
Fais-nous comprendre qu’il ne suffit pas d’accueillir, il faut attendre.
Accueillir est parfois un signe de résignation.
Attendre est toujours un signe d’espérance.
Rends-nous pour cela ministres de l’attente.

Quand le Seigneur viendra, ô Vierge de l’Avent, qu’il nous surprenne,

grâce à ta complicité maternelle, la lampe à la main.

Mgr Tonino Bello